Interview d’Audrey Telliam, créatrice des ateliers capillaires Comp’Hair

Nous avons interviewé Audrey Telliam, la créatrice des ateliers capillaires Comp’Hair, des conseils d’une experte qui vous permettra de mieux connaître l’entretien des cheveux crépus, bouclés, frisés ou locksés naturels de votre enfant. Un super moment intergénérationnel à partager! Elle nous en dit plus.
AKS -Bonjour Audrey, peux-tu te présenter à nos lect.eurs.rices?
Audrey: Je suis Audrey Telliam, j’ai 31 ans et je suis maman d’une petite fille de 8 mois. J’ai créé Comp-hair, mon entreprise, depuis 2014. Au départ, l’idée était de mettre en place une marketplace, une place de marché où l’on pourrait trouver des produits capillaires issus de différentes boutiques, mais sur un seul et même lieu, et en même temps avoir des conseils. Au fur et à mesure la partie conseil a pris de plus en plus de place, et j’ai mis en place des ateliers pour enfants ou adultes pour savoir comment utiliser les produits capillaires pour les cheveux crépus, bouclés, frisés, locksés et même défrisés. Aujourd’hui je me suis un peu plus focalisée sur les cheveux afro crépus et bouclés, naturels. J’ai fermé la boutique en ligne il y a quelques mois (fin 2016) pour me consacrer uniquement aux ateliers, et je propose des accompagnements individuels ou en groupe autour de la connaissance du cheveu naturel, autour de l’état d’esprit à avoir, des gestes avoir, de la routine à mettre en place… On aborde énormément de sujets. Les clientes peuvent également retrouver en atelier une sélection de produits français.
-Est ce que cet intérêt pour l’entretien des cheveux naturels vient de ta propre expérience?
Audrey: Oui complètement. Je suis revenue moi-même au naturel en 2012, et j’ai découvert que je ne connaissais pas du tout cette tendance et cet engouement qu’il y avait pour le cheveu naturel. Je l’ai découvert sur les réseaux sociaux, sur Youtube. D’ailleurs, au départ on proposait des rencontres virtuelles entre les blogueuses et leurs abonnées. C’était avant que n’apparaissent Snapchat, les Facebook live et Insta Direct. Les filles communiquaient sur leur blog ou via leur chaîne Youtube avec leurs abonnées mais il n’y avait pas vraiment d’interaction en direct. On faisait l’intermédiaire entre les deux et c’est comme ça que j’ai commencé à découvrir cet environnement.. A côté des réseaux sociaux il y avait aussi mon expérience personnelle : pour commencer, j’ai arrêté le défrisage pendant quatre ou cinq mois et j’ai très vite voulu apprendre à m’occuper de mes cheveux sans mes longueurs défrisées. Donc j’ai tout coupé, j’ai fait mon big shop, comme on dit.
-Est ce que tu l’as bien vécu ou bien ça a été difficile au départ?
Audrey: Non je l’ai très bien vécu. Mon compagnon m’a soutenu, il me charriait et se moquait un petit peu au départ mais il m’a aussi soutenue car il a compris que c’était un acte important. A l’époque je n’avais pas encore lancé ma société donc j’étais salariée et malgré les remarques de mes collègues, je l’ai très bien vécu. Au contraire, je pense que le retour au naturel s’est accompagné d’une affirmation de moi-même, de mon caractère.
-Est-ce que tu as eu des difficultés à trouver des produits adéquats et comment tu as fait ton choix parmi l’offre disponible?
Audrey: Justement, l’idée du comparateur est venue de mon expérience. Je me suis retrouvée avec pas mal de produits sur le marché. A ce moment là en 2012 on commençait à trouver quelque marques sur le marché donc on avait quand même une offre assez importante. La difficulté résidait dans le fait de trouver ce qui allait convenir car finalement il y avait beaucoup de choix. J’ai beaucoup regardé des revues et des personnes qui avait des cheveux qui se rapprochaient de mon type de cheveux pour voir ce que les influenceuses utilisaient. Je me suis orientée vers la marque Shea Moisture qui est très utilisée par les nappy. Au fur et à mesure, le fait de côtoyer des marques françaises m’a incité à les utiliser. On a tendance à utiliser des marques américaines mais en France on a finalement des créatrices qui font de très bonnes choses et j’ai commencé à utiliser leurs produits en privilégiant le local.
-Et aujourd’hui à qui s’adressent tes ateliers capillaires?
Audrey: J’ai remarqué qu’en fonction de la formule que je propose, le public est différent. Les mamans préfèrent les ateliers en présentiel. Cela leur permet d’impliquer leur enfant dans la démarche alors que l’atelier en ligne a plus de succès auprès des jeunes femmes recherchant des conseils pour elles-mêmes.
Globalement je reçois quand même plus de demandes de parents. J’ai également une petite préférence aussi pour les ateliers avec les parents maintenant que je suis moi-même maman. J’aime beaucoup le partage avec les enfants.
-Avec toutes les observations que tu as pu faire depuis que tu mets en place les ateliers, pourrais-tu me dire pour toi quelles sont les conséquences d’une méconnaissance de l’entretien des cheveux naturels?
Audrey: Il y a déjà un problème d’acceptation de son cheveu parce que quand on a une mauvaise connaissance de l’entretien du cheveu afro, on le dévalorise. Il y a aussi des problèmes d’entretien au quotidien, à savoir que je ne suis pas contre le fait de porter des rajouts, des mèches, des tissages, tant que c’est considéré comme un accessoire, un choix et non une obligation. Aujourd’hui les personnes doivent avoir conscience qu’on a le choix de porter nos cheveux au naturel. Notre cheveu est beau. Ce ne sont que des cheveux mais c’est un sujet qui crée beaucoup de frustrations et même parfois un vrai mal être dans la vie personnelle et professionnelle.
-Il y a aujourd’hui un engouement des parents pour apprendre à s’occuper des cheveux de leurs enfants. Comment les gens faisaient avant pour transmettre la connaissance de l’entretien du cheveu afro, et comment s’explique cette forte demande de transmission aujourd’hui? Est ce que la transmission a manqué quelque part?
Audrey: Je pense que la transmission se fait de mère en fille ou via une sœur, une tante… Suite à l’un de mes derniers ateliers, une maman m’a envoyé une photo de sa fille en train de colorier dans une livret de coloriage de figurines noires et métissées. Comme cette maman est blanche et le papa afro-descendant, elle me montrait que suite à l’atelier sa petite s’était mise au coloriage de ce livret. Pour la maman, cela voulait dire que sa fille avait pris conscience de son cheveu afro. Pour les enfants métissés qui sont au carrefour de deux cultures et ont du mal à se reconnaître, le fait de lui montrer qu’elle avait des figures où elle pouvait se projeter, ça lui a fait plaisir. La maman avait contribué à la construction identitaire de sa fille et l’atelier était un moment de partage fort. Pour répondre à ta question, je pense que la transmission se fait de génération en génération, et je ne sais pas pourquoi aujourd’hui les modes reviennent. Dans ma famille, mes sœurs et ma mère sont aussi revenues au naturel, et ma mère m’a dit qu’à son époque, elles utilisaient les même produits qu’on utilise aujourd’hui, sauf qu’elles ne coiffaient pas leurs cheveux de la même manière. Pour elles pas de twist ni de braid out, c’était plus une coiffure afro pas définie mais en boule comme Angela Davis. Mais les matières premières ont toujours été là, elles pouvaient les trouver dans leur jardin. Je pense aussi que c’est l’influence de la société et des médias qui a fait que les femmes ont délaissé les matières premières naturelles et locales pour le soin de leur cheveux. Cette connaissance, elle vient, elle part, et l’engouement actuel est venu des blogueuses américaines. Les femmes ont pris conscience encore une fois de leur beauté naturelle, et il y a aussi un changement au niveau de la façon de consommer, avec le bio et les produits naturels qui font parti de la tendance actuelle.
Quand tu parles de matières naturelles, de quoi s’agit-il?
Audrey: Elle faisait référence à l’hibiscus, à l’aloe vera. Moi je suis originaire des Antilles, de la Martinique, et elle me disait que dans la maison de ses parents, il y avait ces produits. On pouvait retirer le gel de l’aloe vera et s’en servir pour le soin des cheveux.
Merci beaucoup Audrey pour cette présentation!
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